Par un arrêt rendu le 9 avril 2014[1], le Conseil d’Etat réaffirme le principe selon lequel une donation ne peut être contestée par l’administration fiscale sur le fondement de l’abus de droit qu’à condition de démontrer le caractère fictif de la donation, c’est-à-dire l’absence d’intention libérale du donateur (et non sur le fondement de la fraude à la loi[2]).
En l’espèce, un couple avait donné les titres de sociétés exploitant un supermarché à leurs enfants (pour certains avec réserve d’usufruit). Les enfants avaient ensuite apporté les titres objet de la donation à des SCI dont les statuts attribuaient aux parents donateurs de larges pouvoirs de gestion (avec report du démembrement sur certains titres des SCI reçus en échange). Enfin, quelques jours après la réalisation de l’apport, les SCI avaient cédé les titres apportés (objets de la donation).
Pour la première fois, le Conseil d’Etat s’est estimé compétent pour contrôler, au titre de la qualification juridique des faits, que la donation s’était bien traduite par un dépouillement immédiat et irrévocable du donateur caractérisant son intention libérale.
Le Conseil d’Etat a considéré que des éléments tels que :
– la rapidité de la revente des titres objets de la donation par les SCI,
– la circonstance que l’acte de donation soit assorti d’une clause d’inaliénabilité des titres donnés durant la vie du donateur, et
– l’octroi aux donateurs usufruitiers de pouvoirs étendus de gestion et de décision au sein des SCI bénéficiaires de l’apport des titres objets de la donation,
ne sont pas de nature à remettre en cause le dépouillement immédiat et irrévocable des donateurs.
[1] CE 9 avril 2014 n° 353822
[2] L’abus de droit par fraude à la loi vise les actes qui, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales de l’intéressé.