FISCALITÉ DES PARTICULIERS

Droit à l’erreur : Ouverture du site oups.gouv.fr

Dans le cadre du droit à l’erreur, la loi ESSOC[1] institue une présomption de bonne foi au profit des contribuables dans le cadre des démarches administratives de la vie courante pour les particuliers et les entreprises (déclarer ses revenus, partir à la retraite, erreur dans la déclaration et le paiement de la TVA, la CFE, la CVAE etc.). Il appartient à l’administration fiscale de démontrer la mauvaise foi de l’usager pour appliquer une pénalité ou une sanction financière.

Dans cette optique, le site www.oups.gouv.fr ouvert le 4 juin dernier, recense les erreurs les plus fréquentes et les moyens d’y remédier. 

A vos souris !

Cotisation subsidiaire maladie (« taxe PUMA ») : l’étau se desserre pour 2019

Depuis le 1er janvier 2016, toute personne travaillant ou résidant en France de manière stable et durable peut bénéficier d’une prise en charge en France de ses frais de santé dans le cadre de la PUMA, sous réserve de contribuer au financement de l’assurance maladie.

Cette contribution dite « taxe PUMA », initialement due par tous les contribuables qui percevaient de faibles ou aucun revenu d’activité (moins de 3.973 €/an initialement), mais dont les revenus du patrimoine (dividendes, revenus fonciers, plus-valus, etc.) étaient supérieurs à 9.843 €/an, a donné lieu à des redressements nombreux et significatifs.

Le dispositif institué en 2016 a été assoupli sur trois points. A compter du 1er janvier 2019[2] :

  • Le seuil de revenus a été relevé : depuis le 1er janvier 2019, la taxe PUMA est due par les contribuables dont les revenus annuels d’activité sont inférieurs à 8.105 € en 2019 (au lieu de 3.973 € en 2018).
  • L’assiette de la taxe PUMA (qui est constituée des revenus du patrimoine) a été doublement limitée : elle fait l’objet d’un abattement de 20.262 € pour 2019 (9.843 € en 2018). En outre, elle est désormais plafonnée à 324.192 €.
  • Le taux de la taxe a été réduit à 6,5% (contre 8% en 2018).

Ce qu’il faut retenir : Les contribuables les plus modestes échapperont à la taxe PUMA à compter du 1er janvier 2019. Les contribuables qui resteront redevables de la taxe PUMA devraient constater une réduction de leur cotisation dès 2019.

Nouvel abus de droit : Bercy confirme que le démembrement de propriété n’est pas un acte de nature à caractériser un but « principalement » fiscal 

La Loi de finances pour 2019 a mis en place un nouveau dispositif d’abus de droit, qui permet à l’administration fiscale d’écarter, pour tous les actes réalisés à compter du 1er janvier 2020, ceux qui ont un but « principalement » fiscal, et non plus « exclusivement » fiscal.

Une réponse ministérielle du 13 juin 2019[3] précise utilement que :

« L’intention du législateur n’est pas de restreindre le recours aux démembrements de propriété dans les opérations de transmissions anticipées de patrimoine, lesquelles sont, depuis de nombreuses années, encouragées par d’autres dispositions fiscales.

Ainsi, la nouvelle définition de l’abus de droit […] n’est pas de nature à entraîner la remise en cause des transmissions anticipées de patrimoine et notamment celles pour lesquelles le donateur se réserve l’usufruit du bien transmis, sous réserve bien entendu que les transmissions concernées ne soient pas fictives. 

L’administration appliquera, à compter de 2021, de manière mesurée cette nouvelle faculté conférée par le législateur, sans chercher à déstabiliser les stratégies patrimoniales des contribuables.

Les précisions sur les modalités d’application de ce nouveau dispositif vont être prochainement apportées en concertation avec les professionnels du droit concernés ».

A suivre…

 

FISCALITÉ DES ENTREPRISES

Intégration fiscale : Les aménagements apportés au dispositif par la Loi de finances 2019[4] viennent d’être précisés par décret

En particulier :

1. Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019, la neutralisation de la quote-part de frais et charges en cas de cession de titres de participation est supprimée.

   Le décret du 14 juin 2019 précise les modalités de détermination du montant brut de la plus-value servant d’assiette au calcul de la quote-part de frais et charges lorsque :

  • des plus ou moins-values de cession de titres de participation ont été neutralisées au titre d’exercices ouverts avant le 1er janvier 2019 et que la quote-part de frais et charges s’applique au montant brut des plus-values de cession afférentes aux mêmes titres lors de leur première cession intervenant au cours d’un exercice ouvert à compter du 1er janvier 2019,
  • à compter de 2019, la société propriétaire des titres sort du groupe ou si elle perd sa qualité de société intermédiaire, de société étrangère d’un groupe horizontal ou d’entité mère non résidente

2. Les entreprises doivent souscrire un état des plus-values ou moins-values de cession de titres de participation neutralisées pour les exercices ouverts avant 2019 pour lesquelles la quote-part de frais et charges n’a pas été encore appliquée.

3. Pour atténuer les conséquences du Brexit dans le cadre de l’intégration fiscale horizontale, il a été prévu la possibilité de substituer à l’entité mère non-résidente établie au Royaume-Uni, une société étrangère détenue par cette entité et établie hors de l’Etat de retrait.

Le décret précise les obligations déclaratives afférentes à cette situation. En particulier, la société mère doit adresser, à l’administration, l’accord de la société étrangère pour cette substitution au plus tard à l’expiration du délai de dépôt de la déclaration de résultat de l’exercice au cours duquel intervient le retrait de l’Etat de l’Union européenne.

Le non-respect par la société apporteuse de son engagement de conserver pendant trois ans les titres de la société bénéficiaire de l’apport n’emporte pas déchéance du régime de faveur

Pour mémoire, avant le 1er janvier 2018 :

  • Les apports partiels d’actifs (« APA ») d’une branche complète d’activité ou assimilée bénéficiaient de plein droit du régime de faveur des fusions en matière d’IS sous réserve notamment que la société apporteuse s’engage à conserver pendant 3 ans les titres de la société bénéficiaire de l’apport.
  • Cet engagement de conservation des titres s’appliquait également aux opérations d’APA placées sous le régime de faveur des fusions sur agrément, tels que les apports de titres venant renforcer une participation déjà majoritaire.

La seconde LFR pour 2017 a supprimé cet engagement de conservation pour tous les APA d’une branche complète d’activité ou assimilée ainsi que pour les apports de titres renforçant une participation majoritaire (désormais placés de plein droit sous le régime de faveur des fusions), réalisés à compter du 1er janvier 2018.

Dans un rescrit du 28 mars 2019[5], l’administration fiscale a précisé que, dans l’hypothèse d’une cession de titres grevés d’un engagement de conservation suite à une opération d’APA réalisée avant le 1er janvier 2018 et placée sur agrément sous le régime de faveur des fusions :

  • Il ne peut être exigé que le cessionnaire reprenne cet engagement, et
  • le régime de faveur accordé dans le cadre de cette opération ne pourra pas être remis en cause de manière rétroactive au seul motif de la rupture de l’engagement de conservation des titres. 

Ce qu’il faut retenir : le bénéfice du régime de faveur des fusions, accordé sur agrément pour une opération initiale d’apport de titres réalisée avant le 1er janvier 2018, ne pourra être remis en cause de manière rétroactive au seul motif que la société apporteuse rompt son engagement de conservation de titres.

Sociétés de personnes et confusion de patrimoine : de « Quemener » à « SCI FRA » en passant par « Lupa », la saga jurisprudentielle continue !

Les résultats des sociétés de personnes sont (sauf option pour l’IS) imposables au nom de leurs associés au prorata de leurs droits, que ce résultat soit distribué ou non.

Des règles spécifiques pour le calcul des plus-values constatées en cas de cession des parts de ces sociétés ou de confusion de leur patrimoine ont été dégagées par le Conseil d’Etat :  

1. Dans sa décision « Quemener » du 16 février 2000, le Conseil d’Etat a considéré que le prix de revient des parts d’une société de personnes relevant de l’IR devait être majoré de la fraction de ses résultats (positifs ou négatifs) imposés, avant la cession de ces parts, au nom des associés cédants.

2. Puis, dans sa décision « Lupa » du 6 juillet 2016, le Conseil d’Etat a refusé d’appliquer sa jurisprudence « Quemener » dans l’hypothèse de la confusion du patrimoine d’une société de personnes qui avait été précédée, au cours du même exercice, d’une réévaluation libre de ses actifs (immobiliers en l’espèce).

Le Conseil d’Etat a ainsi refusé que l’imposition du profit résultant de la réévaluation des actifs d’une société de personnes puisse être évitée par l’imputation de la moins-value résultant de l’annulation de ses parts lors de sa confusion.  

3. Le Conseil d’Etat est finalement revenu sur sa décision « Lupa » dans son arrêt « FRA SCI » du 24 avril 2019. Il a considéré que la jurisprudence « Quemener » trouvait à s’appliquer dans le cas d’une réévaluation libre des actifs d’une société de personnes relevant de l’IR, suivie au cours du même exercice, de sa confusion de patrimoine.

Si cette jurisprudence « SCI FRA » est la bienvenue, il convient toutefois de la mettre en perspective avec le nouveau dispositif de l’abus de droit prévu par la Loi de finances pour 2019, qui permet à l’administration fiscale d’écarter les actes réalisés à compter du 1er janvier 2020 dans un but « principalement » fiscal, et non plus « exclusivement » fiscal.

En effet, comment démontrer que la réalisation, au cours d’un même exercice, d’une réévaluation libre des actifs d’une société de personnes puis de sa confusion de patrimoine soit justifiée par « des motifs commerciaux valables qui reflètent la réalité économique »[6] et non pour des raisons principalement fiscales (neutralisation de l’imposition du profit résultant de la réévaluation libre des actifs par l’imputation de la moins-value de confusion et réévaluation des bases d’amortissement…) ?

Ce qu’il faut retenir : Dans le cadre d’une confusion de patrimoine d’une société de personnes relevant de l’IR, précédée au cours du même exercice d’une réévaluation libre de ses actifs, le prix de revient des parts de cette société doit, pour la détermination de la plus ou moins-value de confusion, être corrigé du profit résultant de la réévaluation libre de ses actifs.

 

Claire Guionnet-Moalic                             Marie Dubois
Avocat associé                                                 Avocat collaboratrice

 

 

[1] Loi n°2018-727 pour un Etat au service d’une société de confiance, du 10 août 2018.

[2] Loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.

[3] Réponse ministérielle de Madame Catherine Procaccia, JO Sénat du 13 juin 2019, question n°09965.

[4] Loi 2018-1317 du 28-12-2018 art. 32.

[5] Source : BOI-RES-000040-20190529

[6] Nouvel article 205 A du Code général des impôts