Par une décision du 20 juin 2014 [1], le Conseil Constitutionnel a:
1. considéré qu’il était contraire à la Constitution que le gain réalisé par des personnes physiques, en cas de rachat par la société émettrice de ses propres titres, relève de régimes fiscaux différents selon l’objectif poursuivi par la société lors de ce rachat : réduction de capital non motivée par des pertes, attribution d’actions aux salariés…,
2. décidé que tous les gains réalisés depuis le 1er janvier 2014 par des personnes physiques lors du rachat par la société émettrice de ses propres titres seraient imposables en tant que plus-values sur titres; à moins que d’ici le 31 décembre 2014 le législateur adopte un dispositif fiscal uniforme pour l’ensemble des gains résultant du rachat de ses propres titres par la société émettrice.
Ainsi, sous réserve des réformes qui pourraient être adoptées d’ici la fin de l’année (avec effet rétroactif au 1er janvier 2014), tous les gains résultant du rachat par une société de ses propres titres:
- relèveront du régime fiscal des plus-values (et non du régime des revenus distribués qui était applicable au gain réalisé lors d’un rachat de titres en vue d’une réduction de capital non motivée par des pertes) et seront soumis :
– au barème progressif de l’IR (taux marginal de 45%) après application d’un abattement en base en fonction de la durée de détention [2], et
– aux prélèvements sociaux de 15.5% pour leur montant total (sans abattement) ;
- seront exonérés d’IR si les titres rachetés étaient inscrits sur un PEA depuis au moins cinq ans.
3. jugé que pour les rachats effectués avant le 1er janvier 2014, les personnes physiques ayant cédé leurs titres sont fondées à revendiquer l’application du régime fiscal le plus favorable entre le régime des plus-values sur titres et celui des revenus distribués.
A condition d’être présentée d’ici le 31 décembre 2014, cette action en restitution de l’impôt peut porter sur les cessions réalisées depuis le 1er janvier 2011 [3].
Il appartient donc aux personnes physiques ayant cédé leurs titres à la société émettrice depuis le 1er janvier 2011 d’apprécier leur intérêt éventuel à réclamer en fonction de leur situation personnelle et des circonstances du rachat de leurs titres ; étant rappelé que, compte tenu des réformes fiscales successivement intervenues, le régime fiscal comparé (hors prélèvements sociaux) des plus-values sur titres et des revenus distribués a évolué comme suit depuis 2011:
Cession / Rachat de titres effectués en 2011
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Cession / Rachat de titres effectués en 2012
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Cession / Rachat de titres effectués en 2013 |
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Revenus distribués |
Imposition au barème progressif de l’IR après abattement en base de 40% | ||
Avec abattement de 1 525€ pour une personne célibataire et 3 050€ pour un couple | Avec prélèvement à la source non libératoire de 21% à titre d’acompte sur l’’IR | ||
Possibilité d’option pour le prélèvement à la source libératoire de l’IR au taux de 19% | Possibilité d’option pour le prélèvement à la source libératoire de l’IR au taux de 24% | ||
Plus-value |
Imposition au taux proportionnel de 24% |
Imposition au barème progressif de l’IR après abattement en base pour durée de détention |
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Abattement :
– 20% entre 2 et 4 ans ; – 30% entre 4 et 6 ans ; – 40% au-delà de 6 ans.
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Abattement de droit commun :
– 50% entre 2 et 8 ans ; – 65% au-delà de 8 ans.
Abattement majoré [1] : – 50% entre 1 et 4 ans ; – 65% entre 4 et 8 ans ; – 85% au-delà de 8 ans. |
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Sur option : Imposition au taux forfaitaire de 19% |
Ce qu’il faut retenir :
Il ressort d’une décision rendue le 20 juin 2014 par le Conseil Constitutionnel que tous les gains réalisés lors du rachat de ses propres titres par la Société émettrice doivent relever d’un régime fiscal unique pour les cédants personnes physiques :
- Pour les rachats effectués depuis le 1er janvier 2014, le gains sera soumis au régime des plus-values sur titres, sauf modification rétroactive du régime par le législateur ;
- Pour les rachats effectués entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2013, les cédants personnes physiques sont fondées à déposer avant le 31 décembre 2014 une réclamation à l’effet de revendiquer l’application du régime fiscal qui leur aurait été le plus favorable (entre le régime des plus-values et celui des revenus distribués) et la restitution de l’excédent d’impôt éventuellement constaté.
[1] Décision n°2014-404 QPC
[2] Pour les cessions réalisées depuis 2013, l’abattement de droit commun est de 50 % entre 2 et 8 ans de détention et de 65 % à partir de 8 ans de détention. L’abattement majoré s’établir à 50 % entre 1 à 4 ans de détention; à 65 % entre 4 et 8 ans et à 85 % à partir de 8 ans de détention (article 150-0 du CGI).
[3] Conformément à l’article L190 al. 4 du LFP, les actions en restitution d’impositions indues fondées sur la non-conformité de la règle de droit prescrivent jusqu’au 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de la notification de la mise en recouvrement.
[4] L’abattement majoré est applicable, sous conditions, aux cessions de titres de PME au sens communautaire acquis ou souscrits dans les 10 ans suivant leur création ; aux cessions familiales et aux cessions par les dirigeants partant à la retraite.