Par un arrêt du 23 mai 2013, la Cour de cassation se prononce clairement sur cette question qui donnait lieu à des décisions contradictoires de cours d’appel : sauf vice du consentement, l’existence d’un conflit entre le salarié et l’employeur ne remet pas en cause la validité de la rupture conventionnelle (Cass. Soc. 13 février 2013 n° 12-13.865 (n° 934 FS-PBR), Sté Oratio avocats c/ C.)
La Cour invalide ainsi la position adoptée par de nombreuses cours d’appel qui avaient transposé à la rupture conventionnelle homologuée la jurisprudence adoptée à propos d’autres résiliations amiables du contrat de travail (notamment, CA Versailles 15 décembre 2011 n° 10-6409 : NA-I-27975 fv ; CA Reims 16 mai 2012 n° 11-624 : NA-I-27983 fv).
La position de la Cour de cassation est cohérente avec l’intention exprimée par les partenaires sociaux dans l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008. Ceux-ci avaient en effet assigné comme objectif à la rupture conventionnelle de permettre à l’employeur et au salarié de se séparer dans le cadre d’un processus négocié, sans passer par la procédure de licenciement, y compris donc lorsque cette rupture résulte d’un désaccord compromettant la poursuite du contrat de travail.
Cette solution est également conforme à la volonté du législateur, qui a assorti la rupture conventionnelle d’une série de règles procédurales destinées à garantir l’intégrité du consentement des parties : assistance possible du salarié lors d’un entretien, homologation administrative, délai de rétractation, délai de contestation.
L’ensemble de ces garanties permet de garantir que l’existence éventuelle d’un contentieux entre les parties au moment de la rupture conventionnelle n’affecte pas nécessairement la validité de l’accord de résiliation du contrat.
L’existence d’un tel conflit doit néanmoins conduire à la plus grande prudence, afin de garantir que le consentement du salarié a été donné librement, conformément à l’article L 1237-11 du Code du travail.
Ainsi, la signature par le salarié d’une convention de rupture sous la menace de l’employeur de voir ternir la poursuite de son parcours professionnel en raison de ses erreurs et manquements entacherait la convention de nullité.
La rupture conventionnelle peut alors être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 30 janvier 2013 n° 11-22.332 : FRS 4/13 inf. 9 p. 8 ou FR 7/13 inf. 11 p. 31).
Ce qu’il faut retenir :
– Un conflit avec le salarié n’exclut pas nécessairement la conclusion d’une rupture conventionnelle ;
– Il faut néanmoins dans ce cas faire preuve de la plus grande prudence, afin d’assurer et pouvoir démontrer, le cas échéant, la liberté du consentement du salarié.